Le dimanche, jour du Seigneur, jour où nous célébrons la résurrection du Christ
En cette fin d’année, nous rentrons dans le « temps ordinaire », mais le dimanche, jour du Seigneur, n’est pas un jour ordinaire puisque nous célébrons tous les dimanches la résurrection du Christ !
C’est en effet le mystère pascal que nous célébrons tous les dimanches, et nous sommes associés par notre baptême au mystère de la mort et de la résurrection du Christ.
Aussi, nous vous proposons en illustration de cet article trois chants à tonalité pascale qui peuvent convenir comme chants d’entrée pour tous les dimanches, notamment pour les dimanches du temps ordinaire, afin d’aider l’assemblée à pénétrer dans le mystère pascal célébré.
Ils sont interprétés ici par la Schola Saint Martin et extraits du CD enregistré par notre chorale de secteur
Le rassemblement dominical (= du dimanche, jour du Seigneur, du latin dies dominica) que nous désignons habituellement sous le mot « Messe » ou aussi sous le mot « Eucharistie » trouve son origine dans les premières communautés chrétiennes, dès le tout début de l’Eglise ; nous en trouvons trace déjà dans les Actes des Apôtres ; le mot « Eglise » lui-même signifie « convocation du peuple » par Dieu (du grec εκκλησία, ecclèsia, prononcé « ecclisia », lui-même traduisant l’hébreu quâhâl), et c’est bien de cela qu’il s’agit ici, de notre réponse à une invitation pressante du Christ qui nous dit : « J’ai désiré d’un grand désir manger cette Pâque avec vous » (Lc 22, 15).
Cependant ce rassemblement dominical pour célébrer le mystère pascal a été désigné par des termes variés, dont il est intéressant de voir le sens et l’origine, car chacun met l’accent sur l’un des aspects de la célébration, aspect qu’ainsi il souligne et auquel il renvoie, le tout étant désigné symboliquement par une partie ou un aspect de la célébration, ainsi : Fraction du pain, Eucharistie, Messe, Saints Mystères, Oblation, Sacrifice, Repas du Seigneur, Sainte Cène (chez nos frères protestants), Divine Liturgie (chez nos frères d’Orient) ; nous nous attacherons ici aux trois premiers de ces termes.
Le premier de ces termes, que l’on retrouve dans les Actes des Apôtres, est celui de « fraction du pain », à laquelle les disciples se montraient assidus (Ac 2, 42) et qui rassemble les frères le premier jour de la semaine (Ac 20, 7) ; on le trouve déjà dans le récit par Luc des pèlerins d’Emmaüs, qui reconnaissent le Seigneur à la fraction du pain (Lc 24, 30-31.35), quand le Christ ressuscité refait les gestes de son dernier repas.
Le rite de la fraction passe aujourd’hui trop souvent inaperçu, effectué furtivement après le geste d’échange de la paix, ou parfois déjà esquissé pendant la consécration pour en quelque sorte illustrer le récit de l’institution, et c’est dommage car, à sa juste place avant la communion, il exprime fortement qu’un seul Corps est rompu pour tous (1 Cor 10, 16-17) ; ce rite de la fraction est normalement accompagné du chant de l’Agnus, qu’il convient de garder fidèlement à cette place car il ajoute au symbolisme du pain rompu et partagé le symbolisme de l’Agneau immolé pour nous (il est à noter qu’agneau et serviteur sont désignés par le même mot talya’ en araméen).
Un deuxième terme, employé très tôt et aujourd’hui remis à l’honneur avec bonheur, est celui de « eucharistie » ; on le retrouve dès le IIème siècle en Syrie dans la Didachè ou dans les Lettres d’Ignace d’Antioche, et à Rome dans l’Apologie de saint Justin. Le terme vient du grec ευχαριστία (eucharistia) et signifie « action de grâce », reconnaissance des bienfaits de Dieu ; encore aujourd’hui le verbe ευχαριστώ (eucharistô, prononcé « efcharistô ») est utilisé par les Grecs dans le langage profane et la vie courante pour dire « merci » !
S’enracinant dans la tradition des bénédictions juives, les berakôth, spécialement celles du repas pascal, la prière eucharistique trouve son origine dans la bénédiction prononcée par Jésus lors de la dernière Cène : « Prenant du pain, il rendit grâce » (Lc 22, 19). Bénédiction et action de grâce sont intimement liées ; la bénédiction, du latin benedicere, dire du bien, est d’abord l’acte de Dieu qui dit, veut et réalise notre bien (dire et faire sont un seul et même acte pour Dieu) ; à la bénédiction qui ne cesse de descendre de Dieu sur nous correspond notre propre bénédiction qui monte vers Dieu, c’est-à-dire notre louange et notre action de grâce pour tous ses bienfaits. Le mystère de la liturgie est structuré par cet échange de bénédictions entre Dieu et nous (cf. Ep 1, 3). Si la prière eucharistique proprement dite, qui constitue le cœur de la célébration, depuis le dialogue de la Préface jusqu’à la doxologie qui la conclut, est l’action de grâce par excellence, les bénédictions et l’action de grâce parcourent toute la liturgie, ce qui explique que le mot eucharistie en est venu à désigner l’ensemble de la célébration pascale du dimanche.
Le troisième terme, qui a connu une singulière popularité et qui demeure le plus usité dans l’Eglise romaine, est celui de « messe » ; apparu plus tard, à la fin du IVème siècle, il s’est imposé en Occident à partir du VIème siècle, tandis qu’en Orient se répandra l’usage de l’expression « divine liturgie ». Le terme vient du latin missa qui signifie le « renvoi » du peuple à la fin de la célébration.
La formule latine « Ite, missa est », que l’on pourrait traduire : « Allez, le renvoi est fait » ou « Allez, le congé vous est donné », avait une simple fonction de renvoi de l’assemblée. Comment en est-on venu à désigner curieusement par ce mot non le simple renvoi des fidèles, mais l’ensemble de la célébration qui le précède ? Il semble que l’origine de ce sens nouveau soit à chercher dans la pratique ancienne du renvoi des catéchumènes après la liturgie de la Parole, parce que, explique Isidore de Séville, « c’est le moment du sacrifice, quand les catéchumènes sont renvoyés… » ; mais c’est bien l’ensemble de la célébration, depuis les rites d’entrée et la liturgie de la Parole, que recouvre cette appellation. Notons que la réforme liturgique qui a suivi Vatican II, du moins dans la traduction en langue française, a remplacé avec bonheur cette formule d’envoi par une autre formule : « Allez en paix », formule empruntée aux Eglises d’Orient.
Quoi qu’il en soit, le dimanche, c’est le Jour du Seigneur (Ap 1, 10), le « seigneur des jours » selon l’expression des Pères, premier jour de la semaine, jour où nous célébrons la Résurrection de notre Seigneur, et aussi huitième jour, jour de la plénitude du repos qui suit et remplace le sabbat juif de la première création et jour au-delà du temps sur lequel brille la gloire du Christ ressuscité, anticipation de la vie éternelle, que nous vivons aujourd’hui dans l’attente du retour du Seigneur et de l’avènement de son Royaume.
Et en ce jour nous sommes convoqués pour louer le Seigneur et célébrer dans la joie l’Alliance entre Dieu et son peuple.
Heureux sommes-nous d’être invités au festin des noces de l’Agneau ! (Ap 19, 9)
Sources : Aimé Georges MARTIMORT et coll. : “L’Eglise en prière – Introduction à la liturgie” ;
– Volume II : “L’Eucharistie”, Robert CABIÉ, Desclée, 1983
Pierre JOUNEL : “Le dimanche”, Desclée/Novalis, 1989
Dom Robert LE GALL : “Dictionnaire de liturgie”, CLD, 1982
Xavier LÉON-DUFOUR : “Dictionnaire du Nouveau Testament”, Seuil, 1975
Olivier de CAGNY et Bernadette MÉLOIS : Cours public sur les rites de la messe, Ecole Cathédrale